La cyberpropagande d’Obama et Romney

Le 2 novembre 2012

Appelant ses lecteurs à partager le mailing des deux candidats à la présidentielle américaine, le site ProPublica s'est lancé durant les derniers mois dans un projet sans précédant : prouver l'utilisation de fichiers personnels par Barack Obama et Mitt Romney.

Mr et Mrs Sinker, mari et femme, assis sur un même canapé à Chicago, ont reçu en mars dernier le même mail de l’équipe de campagne de Barack Obama. Le même, à un détail près : M. Sinker se voyait proposer un don de 20$ et madame, de 25$. Une simple ligne corrigée automatiquement par une machine ayant eu accès à une information cruciale : Mme Sinker, 61 ans, avait auparavant été identifiée comme une grosse donatrice dans les fichiers du parti démocrate.

Analysés par ProPublica, les mails d'appel aux dons envoyés par l'équipe d'Obama en mars 2012 montraient des différences notables dans la formulation et les sommes demandés, selon que les sympathisants étaient enregistrés comme déjà donateurs ou non.


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Décortiqué dans un graphique (voir l’illustration ci-dessus), ce cas d’école a été le départ d’une opération de reverse engineering (déconstruction d’un processus technologique) des “mail machines” des principales équipes de campagne. Si la première version du mail s’adressait en part égale à des hommes et à des femmes, donateurs réguliers ou non, pour une somme faible, la version 4 n’a été reçue que par des militants ayant déjà versé de l’argent, majoritairement des femmes, et proposait des montants allant de 0 à 300 dollars. La 5emouture, elle, s’adresse principalement à des hommes, seulement au-dessus de la trentaine et pour des petites sommes.

En faisant appel à ses lecteurs pour qu’ils partagent tous les mails reçus de la part des deux équipes de campagne, les journalistes du site ProPublica ont mis en place un système d’analyse comparative des différents mails envoyés avec pour objectif de prouver que ces équipes avaient recours à des systèmes automatisés de microciblage des militants.

Le 7 juillet, le site a ainsi analysé trois envois de l’équipe d’Obama. Grâce aux données récoltées par ProPublica, les journalistes ont pu classer les mails par “donation signal”, c’est-à-dire selon les montants des dons proposés lors des précédents mails. Aux profils gros donateurs, habitués aux mails demandant 220 à 280 dollars est envoyée une version remplie de liens de dons en un clic, prélevant automatiquement la somme proposée sur le numéro de compte enregistré. Pour les petits donateurs, bombardés de demandes de dons à moins de $40, il faut passer par une URL. Une preuve de la génération de mail “sur mesure” selon un critère renseigné dans les bases de données des partis.

Dans cette frise réunissant tous les mails transmis à ProPublica, chaque barre correspond au volume de mail envoyé par chaque équipe un jour donné, sa couleur correspondant à le nombre de variation par mail (tirant vers le rouge pour les plus optimisés).

Si l’analyse est encore en cours et les outils s’affinent au fil des jours, un résumé général donne à voir le bilan des mails déjà scannés. De mars à aujourd’hui, la quantité de mails est représentée pour chaque jour par une barre colorée, sur la ligne de l’expéditeur, dont la couleur change en fonction du nombre de variations, tirant vers le rouge pour les mails proposant le plus de versions différentes. Et dans les sondages comme dans l’utilisation des bases de données, Barack Obama semble conserver une avance certaine.


Illustration via la galerie Flickr de Nick Jugular [CC-byncsa]

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